dimanche 16 février 2014

Les Calendes Grecques.

                                        Ce n'est pas la première fois : je vous ai déjà présenté sur ce blog des expressions, dictons ou citations qui trouvent leurs sources dans l'Antiquité romaine. Aujourd'hui, j'ai choisi de me pencher sur l'expression : "Remettre aux Calendes grecques".

                                        Sans doute avez-vous déjà entendu cette phrase : remettre ou renvoyer quelque chose aux Calendes grecques (Ad calendas graecas), cela signifie tout simplement que cet évènement n'arrivera jamais. Pour comprendre le sens de l'expression, il faut savoir que les Calendes (calendae ou kalendae en Latin archaïque.) désignaient dans le calendrier romain le premier jour du mois, soit celui de la nouvelle lune puisque la mesure du temps était à l'origine basée sur le cycle lunaire - avant la réforme de Jules César, qui adopte le cycle solaire pour fixer la durée de l'année, mais conserve les divisions des mois en nones, ides et calendes. (Pour plus de détails, voir ici) Mais le calendrier romain, les Grecs n'en avaient rien à faire ! Et ils continuaient à utiliser leur propre calendrier (ou plutôt leurs calendriers, puisque chaque région ou presque avait le sien), à partir des cycles solaire et lunaire. Donc, pas de Calendes en Grèce, et renvoyer une affaire aux calendes grecques signifie la reporter à une date qui n'existe pas - l'équivalent de notre Saint-Glinglin, en somme.

Fragment de calendrier Julien, datant de l'époque impériale.


                                        Par ailleurs, les dettes arrivaient à échéance le premier jour du mois (les Calendes, donc), date à laquelle on devait les rembourser. Le mot "calendrier" vient justement du mot Calendes : le calendarium latin désignait le livre de comptes où l'on consignait les sommes dues aux Calendes. Par extension, le terme s'est bientôt appliqué au registre sur lequel on notait les évènements prévus au cours du mois.

                                        Selon Suétone, c'est à l'Empereur Auguste que l'on devrait l'image des "calendes grecques". Des expressions fantasques et savoureuses comme celle-ci, le fondateur de l'Empire, homme d'une finesse d'esprit et d'une verve malicieuse, en avait apparemment plein sa musette :  
"On voit dans ses lettres autographes quelques locutions remarquables qui lui étaient familières en conversation. Par exemple, veut-il caractériser de mauvais débiteurs, il dit "qu'ils paieront aux calendes grecques". Pour engager à supporter l'état présent des choses quel qu'il fût, il disait: "Contentons-nous de ce Caton-là". Pour exprimer avec quelle vitesse une chose était faite, il disait: "En moins de temps qu'il n'en faut pour cuire des asperges". " (Suétone, "Vie d'Auguste", 87.)

L'Empereur Auguste. (Musée des Termes, Rome.)


Je pense que j'aurais l'occasion de revenir sur certaines citations d'Auguste. Cette expression des "calendes grecques" est encore utilisée aujourd'hui dans de nombreuses langues, comme l'Anglais, l'Italien, le Portugais, l'Espagnol, etc.

                                        En guise de conclusion, signalons que le mot "calendes” (kalanda - καλενδα) existe bel et bien en Grec, ancien comme moderne : ce sont les chants traditionnels, interprétés à Noël, le Jour de l’an et lors de la fête de l'Épiphanie. Rien à voir avec notre locution augustéenne, donc...

2 commentaires:

  1. Désormais quand je vais remettre le ménage ( et autres corvées) à demain….je saurai que je suis en train de faire du grec! donc culpabilité diminuée! super!

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  2. Et tu pourras frimer, en citant un Empereur romain ! C'est la classe, non ?!

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